Rencontrer Fred Pellerin c’est faire un grand seau dans le monde merveilleux des contes ! Ne dites pas de lui qu’il est un humoriste !! Surtout pas !! Fred Pellerin se veut un « conteux » même s’il possède mille talents dont l’écriture et la musique. Sa matière, c’est son village de Saint-Elie-de-Caxton dans la région de la Mauricie au Québec. Il vient d’une famille « de grande parlure » (dans le texte) où on parle beaucoup, où l’on échange, où l’on rit. Sa grand-mère est un personnage souvent central de ses contes. Il exploite de manière magistrale, la langue, les contes populaires, les habitants de son village et son imagination débordante, qui d’ailleurs déborde souvent ! Toutes les personnes vivant ou ayant vécu à St Elie passent à la moulinette du verbiage de Fred et avec eux, il nous livre des histoires de contes et de légendes qui partent parfois d’un petit rien. Et puis surtout, il défend une culture, celle du Québec qui se sent le cousin de la France mais se cherche toujours une légitimité. Fred Pellerin travaille à donner à ce pays une fierté qu’elle ignore ! car le Québec, ce n’est pas le Canada, c’est une province bien à part dans ce si grand pays. Il met en valeur la culture québécoise à l’instar d’un Vigneault, d’un Charlebois ou d’une Céline… En janvier 2013, alors qu’il reçoit la médaille de Chevalier de l’Ordre National du Québec, il fait un discours éloquent sur ce pays qu’il aime tant, et, en parlant de Louis Emont, il cite cette phrase « ces gens-là font partie d’une race qui ne sait pas mourir » et il espère que ses enfants diront un jour « qu’on est d’une race qui sait exister ». Ce pays, il en est fier et il le dit chaque fois qu’il le peut et surtout chaque fois qu’il traverse l’Océan pour venir sur le vieux continent.
Il défend également les contes et les légendes populaires, car pour lui c’est un puits de création infini. Il estime que souvent, on imagine les contes comme de la poussière dans la grande littérature alors que pour lui c’est d’une très grande humanité dont il est question. D’abord par son oralité et ensuite par les rencontres qu’ils provoquent, entre les générations et entre les peuples, par ce rassemblement sur la durée qui ne tarit jamais tant qu’il existe des conteurs pour les transmettre. C’est parce qu’il a écouté les gens de son village (et notamment Eugène dont il parle souvent), qu’il les a enregistrés et retranscrit que le conte est passé à travers lui vers d’autres générations. Les histoires de Fred Pellerin rassemblent un peu tout ça à travers un langage imaginé, colorié de québecismes, de métaphores, de symboles et d’un travail sur la langue qui ne peut que laisser admiratif. J’ai un souvenir très ému du spectacle qu’il a donné il y a deux ans au Sémaphore à Cébazat (63), j’étais en larmes à la fin et toute la salle a applaudi pendant plus de dix minutes debout, parce que tout de même, ça fait du bien d’entendre de belles histoires !!
Fred Pellerin c’est aussi de la musique et je vous invite à écouter ces albums plein d’une poésie intemporelle, parfois mélancolique mais aussi douce et joyeuse. Il a souvent partagé la scène avec son frère, Nicolas, également excellent musicien.
Enfin, Fred Pellerin est un scénariste talentueux et justement aujourd’hui sort au Canada « l’Arracheuse de temps » dont il a écrit le scénario à partir de son spectacle de 2009, dont voici le synopsis : En 1988, Bernadette tente de rassurer son petit-fils, Fred, qui s’inquiète de son trépas prochain, en lui disant que la Mort n’existe plus. La vieille dame malade lui racontera comment, en 1927, les habitants du village de Saint-Élie-de-Caxton sont parvenus, par des tours rocambolesques, à éliminer la grande faucheuse, après qu’un éclair ait frappé le pommier de l’église, laissant présager un malheur. (Cinoche.com).
Je ne peux que vous inviter à découvrir Fred Pellerin, un conteur facétieux, brillant et si poétique. Avancez dans son univers tendre et fantastique où la langue trône en majesté au milieu d’un imaginaire sans limites et, où la nostalgie danse une gigue joyeuse au rythme du temps qui passe et nous dépasse…
Merci Fred pour tes mots, ta musicalité, ta créativité et ton incroyable humanité.
Ad Litteram 